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Conférence de Florent Rossi

Étude de la dispersion des bactéries dans l’atmosphère: implication dans le transfert de gènes de résistance aux antibiotiques

 

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Mardi 6 juin, 10h00

Pavillon Vachon, room 1168-COPL

L’atmosphère terrestre reçoit en permanence de grandes quantités de matériel d’origine biologique, aussi appelés bioaérosols, émis depuis la surface (sols, eau, phyllosphère, etc…) par des perturbations essentiellement mécaniques telle que le vent. Ainsi, de 7.6 × 1023 à 3.5 × 1024 bactéries pourraient être émises chaque année (Burrows et al., 2009), être transportées par voie aérienne jusqu’à des milliers de kilomètres de leurs sources d’émissions, et rejoindre la haute atmosphère. Cependant, les conditions rencontrées lors du transit atmosphérique (faibles températures, U.V., dessiccation, stress oxydatif, etc…) contraignent fortement la viabilité et l’activité microbienne. Pourtant, des études récentes tendent à montrer l’existence d’un microbiote atmosphérique adapté et bien distinct des sources (Šantl-Temkiv et al., 2022). L’activation de gènes spécifiques après l’aérosolisation, incluant certains gènes de résistance aux antibiotiques (Smith and King, 2022) semble témoigner de l’aspect sélectif imposé par l’atmosphère sur les bactéries qui y transitent. Par ailleurs, l’expression de voies métaboliques impliquées dans la réponse au stress (osmotique, oxydatif) et l’acquisition d’énergie (métabolisme central), en particulier chez des communautés bactériennes issues de nuages (Amato et al., 2019), suggèrent un environnement plus favorable à la survie aérienne, médié par la présence d’eau sous forme de microgouttelettes. Ainsi, l’atmosphère, par l’intermédiaire des nuages, serait un vecteur potentiellement important de bactéries à l’échelle planétaire, transportant avec elles du matériel génétique tel que des gènes de résistance aux antibiotiques (ARGs). Comprendre ces flux et identifier les paramètres météorologiques susceptibles de les influencer permettrait ainsi de mettre en lumière la contribution atmosphérique à la propagation de la résistance aux antibiotiques.

C’est dans ce contexte que s’insèrent mes travaux de recherche au titre de chercheur post-doctorant dans l’équipe du Pr. Caroline Duchaine de l’université Laval, et en collaboration avec le Dr. Pierre Amato de l’institut de chimie de Clermont-Ferrand. Pour la première fois, nous avons pu mettre en évidence des concentrations importantes en ARGs dans des échantillons de nuages et d’aérosols collectés à un site de moyenne altitude (le puy de Dôme, 1465 m a.s.l.), attestant de la provenance lointaine de ces gènes. La forte prévalence observée de gènes impliqués dans les pompes à efflux pourrait suggérer une contribution importante de mécanismes intrinsèques de réponse au stress global issus de sources environnementales (notamment l’océan Atlantique), possiblement favorisées par les conditions rencontrées lors du transit atmosphérique (dessiccation, stress oxydatif, U.V.). Pour l’heure, de nombreuses questions restent en suspens, notamment au regard des sources d’émissions et du devenir de ces gènes, mais nos résultats tendent à mettent en exergue le rôle clé joué par l’atmosphère dans l’acquisition et la dispersion de gènes de résistance aux antibiotiques dans l’environnement.